Les propos qui suivent n'engagent que moi. Ils se basent sur mon expérience (50 ans de sacerdoce) sur ma réflexion, sur ce que j'ai vu dans certains pays d'Afrique et sur ce que je perçois des propos de notre pape François.

Une conviction: Il faudrait que dans chaque communauté humaine, chaque village, chaque quartier, il y ait une visibilité concrète de l'Eglise, à travers des chrétiens qui s'en sentent responsables là où ils sont. Ces chrétiens se répartiraient les tâches, la représentativité, l'information, en fonction de leurs charismes et de leurs possibilités dans le respect du "principe de subsidiarité" = chacun fait ce qu'il sait faire et ce qu'il peut faire, en fonction de son âge, de ses connaissances, de ses goûts, de ce que l'Esprit suggère... "il vaut mieux que beaucoup fassent un petit peu plutôt que peu fassent beaucoup!" Ceci doit se passer en harmonie et en concertation permanente les uns avec les autres sous la responsabilité d'un "berger" ou d'une " bergère", laïc, comme le sont ceux qu'on appelle "catéchistes" en Afrique et dont la mission n'est pas d'abord de "faire le catéchisme", mais de coordonner la pastorale, animer la liturgie, veiller à l'exercice de la charité. Les différents "bergers" de chaque village et de chaque quartier seraient en lien, bien sûr avec un curé, qui ne serait pas d'abord un chef, mais un serviteur, coordinateur, avec une équipe d'animation). En tout cela, chacun doit savoir qu'il est un serviteur, pas un dictateur, ni un être investi d'un pouvoir divin qui lui donnerait des droits d'autorité absolue ou de propriété exclusive du service qu'il rend, ce que notre pape appelle "le cléricalisme", source de bien des abus....
La mission première serait de vivre l'écoute et la fraternité, non seulement avec les chrétiens, mais avec TOUS! C'est d'abord cela la mission: l'autre est important pour lui-même! Pour cela, les chrétiens se réuniraient localement pour voir ensemble concrètement, dans leur entourage ceux qui ont besoin de secours, d'aide, d'écoute, et d'accompagnement: les malades, les isolés, les immigrés, les handicapés de toute nature, ceux qu'on appelle "les pauvres", les blessés de la vie, dont le pape François dit clairement que c'est la mission première de l'Eglise: "soigner les blessures".

La liturgie serait nécessairement branchée sur cette charité active: le lavement des pieds précède l'institution de l'Eucharistie, qui ne doit jamais être un "en-soi" déconnecté d'une communion réelle, en acte. (Les prophètes de l'Ancien Testament se sont sans cesse érigés contre des formes de piété (jeûnes, offrandes, sacrifices, oblations...) qui "oublient" ou contredisent l'amour du prochain. "Nul ne peut aimer Dieu qu'il ne voit pas s'il ignore son frère qu'il voit!" La pratique actuelle de la messe dominicale, telle qu'elle est devenue, laisse, selon moi, beaucoup à désirer! D'ailleurs, bien des chrétiens s'y ennuient et la délaissent. On peut passer 30 années de sa vie à venir à la messe sans connaître le nom des gens qui y participent et sans avoir envie de les connaitre, ni leurs joies, ni leurs peines, ni leurs soucis...Comment une communauté chrétienne sait-elle prendre en charge ceux de ses membres qui sont dans le besoin? et... les autres?

Il est indispensable que les chrétiens se réunissent souvent pour partager et prier ensemble, (sans nécessairement recevoir la communion). Ils peuvent le faire, plusieurs familles ensemble, suivant les quartiers et la proximité, par exemple en se basant sur la Parole de Dieu proposée chaque dimanche et sur laquelle, nous avons à nous interroger. La prière se ferait instante et précise par rapport à des gens concrets qui seraient nommés et "portés" dans le cœur personnellement et communautairement. Chacun pourrait apporter ses doutes et toutes ses questions: c'est si important de se savoir écouté et aimé comme on est! L'espérance et la joie doivent être le moteur de toute communauté!
Les messes seraient moins nombreuses, mais bien préparées, festives, regroupant une fois par mois et/ou pour les grandes fêtes plusieurs communautés locales, en prenant son temps; et, pourquoi pas, suivies de pique-niques ou de repas. La convivialité n'est pas facultative, elle construit la fraternité!

Autant que possible, le catéchisme, la catéchèse se feraient avec les familles et avec tous les volontaires: lorsque des gens prennent la responsabilité de faire baptiser leurs enfants, il est incohérent qu'ils ne participent jamais, d'une manière ou d'une autre, à la formation chrétienne de leur enfant (formation qui n'est pas qu'un savoir, ni une pratique obligée, sans lendemain, mais une vie et une joie!) L'Evangile est pour TOUS, les sacrements de l'Eglise aussi, source de vie et de lumière! Si la vie chrétienne est perçue comme une corvée, c'est que, vraiment, on n'y a rien compris ou... que c'est très mal fait, ce qui est possible aussi!

J'aurais encore beaucoup de choses à préciser, que je ne peux faire ici au risque d'être trop long...!

Jean-François Arnoux